Garantir la provenance des émeraudes ?

C’est en tout cas l’affirmation du laboratoire de gemmologie Gübelin, mondialement reconnu, qui dévoile depuis peu une nouvelle technologie « Provenance Proof, The Emerald Paternity Test » qui a pour objectif de tracer les émeraudes soumises à ce procédé depuis l’extraction jusqu’à la commercialisation. Un objectif plus que louable quand on sait aujourd’hui l’engouement du public pour une plus grande traçabilité et transparence dans le domaine de la joaillerie. Une initiative plus que passionnante. J’ai eu l’occasion de découvrir cette nouvelle innovation et je vous propose de la découvrir aujourd’hui sur le site.

It is in any case the affirmation of the world-renowned Gübelin laboratory, which recently unveiled a new technology « Provenance Proof, The Emerald Paternity Test » which aims to trace the emeralds subjected to this process since extraction until commercialization. A more than praiseworthy objective when we know today the popular enthusiasm for greater traceability and transparency in the field of jewelry. An exciting initiative. I had the opportunity to discover this new innovation and I propose to discover it today on the site.

Photo : Gübelin

Il existe depuis plusieurs années maintenant des analyses conduites par les laboratoires de gemmologie et éventuellement de géologie qui ont pour objectifs d’apporter des informations sur la provenance des pierres qui leurs sont soumises. Parmi les pierres les plus demandées on retrouve bien entendu les émeraudes dont la forte valeur ajoutée (pour les plus belles) nécessitent pour de nombreux acheteurs de tout savoir sur la ou les pierres qu’ils acquièrent. Aussi l’analyse des inclusions mais aussi l’analyse isotopique par spectrométrie de l’oxygène contenu dans ces pierres permettaient d’apporter des éclaircissements quand à leurs provenances. Aujourd’hui, le Gübelin propose d’aller plus loin en marquant les pierres dès la sortie de la mine. Il ne s’agit donc pas d’analyser les pierres pour trouver les caractéristiques du gisement mais bien de fournir une carte d’identité aux pierres, laquelle peut – à priori – être lue à plusieurs reprises sans être altérée.

For several years now, there have been analyzes carried out by gemmological and geological laboratories whose aim is to provide informations on the provenance of the stones submitted to them. Among the most requested stones are of course the emeralds whose high added value (for the most beautiful) require for many buyers to know everything about the stones that they acquire. The analysis of the inclusions but also the isotopic analysis by spectrometry of the oxygen contained in these stones made it possible to clarify their provenances. Today, the Gübelin proposes to go further by marking the stones as soon as the exit of the mine. It is therefore not a question of analyzing the stones to find the characteristics of the deposit but rather of providing a stone identity card, which can – a priori – be read without being altered several times.

Le fill réalisé par le laboratoire Gübelin. Il est en anglais mais les sous-titres sont disponibles dans de nombreuses langues dont le français. The film made by the Gübelin Laboratory, in English but French subtitles are available. Source : Gübelin / YouTube

  • Process

Pour cela, le laboratoire fait appel aux nanoparticules renfermant de l’ADN et incluant dans ce dernier des informations relatives à la mine, à son emplacement précis, à la date d’extraction, à l’entreprise qui a extrait la pierre… Les possibilités sont presque infinies. Les nano-particules mesurent 100 manomètres (0.0001 millimètres), elles sont donc invisibles par les microscopes et, selon le laboratoire, ne modifient en rien l’aspect de la pierre. Après avoir stocké les informations, l’ADN est alors « emprisonné » dans de micro-sphères de silice amorphe pour résister aux étapes de nettoyages, de polissage, de huilages qui peuvent se produire plusieurs fois dans la vie d’une émeraude. Le composé SiO2 utilisé est le même que celui qui constitue les opales naturelles. C’est parallèlement le composé le plus abondant dans la croute terrestre.

For this purpose, the laboratory uses DNA-containing nanoparticles, including informations on the mine, its precise location, the date of extraction, the company that extracted the stone, etc. The possibilities are almost infinite. The nanoparticles measure 100 manometers (0.0001 millimeters), they are therefore invisible by the microscopes and do not modify the appearance of the stone, according to the laboratory. After storing the informations, the DNA is then « trapped » in micro-spheres of amorphous silica to resist to the steps of cleaning, polishing, oiling that can occur several times in the life of an emerald. The SiO2 compound used is the same as that which constitutes the natural opals. It is also the most abundant compound in the earth’s crust.

Les nanoparticules sont fixées à la paroi d’une fissure. Taille réelle de 0,0005 millimètres.  DNA-based nanoparticles tightly adhering to the surface of a rough emerald crystal. Length of bar is 500 nanometres = 0.0005 millimetres. Photo : Gübelin

Les nanoparticules sont stockées dans un liquide à base d’éthanol dans lequel on plonge les émeraudes brutes dès l’extraction avant les opérations de nettoyage et de tri. Ce faisant, elles se fixent partout en surface de la pierre mais elles pénètrent dans les moindres fissures. Une fois le liquide évaporé, celles-ci sont définitivement et intimement liées à la matrice gemme qui les porte. Un brevet international a d’ailleurs été déposé par le laboratoire.

The nanoparticles are stored in an ethanol-based liquid in which the rough emeralds are immersed as soon as the extraction, before the cleaning and sorting operations. In doing so, they are fixed everywhere on the surface of the stone but they penetrate into the smallest cracks. Once the liquid has evaporated, the particules are definitely and intimately linked to the gem matrix which carries them. An international patent was also filed by the laboratory.

Bien entendu, une pierre absolument vierge de fissures n’est pas compatible avec ce procédé mais le laboratoire Gübelin déclare « que selon les experiences menées avec cette technologie, les pierres présentent toujours des fissures submicroscopiques (dont la taille est si minuscule que le microscope ne peut le détecter – source CNRS) compatibles avec les nanoparticles et permettant l’adhérence de celles-ci sur les parois, rendant le test de paternité possible ».

Of course, a stone that is absolutely free of fissures is not compatible with this process, but the Gübelin laboratory states that « according to the experiments carried out with this technology, the stones always have submicroscopic cracks (the size of which is so little that the microscope does not can detect it – CNRS source) compatible with the nanoparticles and allowing the adhesion of these on the walls, making the paternity test possible « .

  • Est-ce un traitement ? Is it a treatment ?

C’est la question que je me suis posée en découvrant le procédé. Doit-on considérer ce marquage comme tel si on se réfère, pour la France, au décret de 2002 concernant le commerce des matériaux gemmes et des perles ? A priori oui puisque ces nanoparticules sont un ajout à la matière gemme hôte. Cela dit, celles-ci ne modifient ni l’aspect ni la couleur des pierres. Et en transmettant des informations cruciales sur la pierre, elles ajoutent une importante valeur ajoutée pour le consommateur ce qui n’est pas le cas de la plupart des traitements qui modifient durablement la pierre et altèrent souvent leurs valeurs financières. Mais le recul sur le procédé est quasi inexistant. Il faudra pour cela patienter plusieurs années pour savoir de manière certaine si celui-ci cause des modifications à la gemme qui l’accueille. Aujourd’hui la décision est dans les mains de la CIBJO qui doit décider de la manière de le classifier. Pour le moment, j’aurai tendance à rejoindre l’avis du laboratoire qui considère que ce n’est pas un traitement car cela n’altère pas physiquement la pierre. Je reste donc curieuse de l’avis de la CIBJO.

This is the question I asked myself when I discovered the process. Should this marking be regarded as it such if we refer, for France, to the decree of 2002 concerning the trade of gemstones and pearls? A priori yes since these nanoparticles are an addition to the host gemstone. However, they do not change the appearance or color of the stones. And by transmitting crucial informations, its adds significant added value to the consumer, which is not the case with most treatments that permanently modify the stone and often alter the value of the stones. But the distance on the process is almost non-existent. It will be necessary to wait several years to know with certainty if this one cause modifications to the gem that welcomes it. Today the decision is in the hands of the CIBJO who must decide how to classify it. For the moment, I will tend to join the opinion of the laboratory which considers that it is not a treatment because it does not physically alter the stone and do not change its value. I therefore remain curious in the opinion of the CIBJO.

  • Est-ce dangereux pour la santé ? Is it dangerous for health ?

La question se pose car de nombreuses questions sur les nanoparticules n’ont pas encore été solutionnées. Comme avec toute nouvelle technologie, une certaine prudence est de mise. On peut néanmoins affirmer plusieurs choses : l’ADN synthétique utilisé est identique à celui-ci contenu dans les plantes, les légumes…etc. Il est donc ingéré quotidiennement par l’homme. Si une question se pose, elle concerne plutôt la nanoparticule dans son ensemble. Si on se réfère aux pré-requis définis par la Commission Européenne et Occupational Safety and Health Administration (OSHA) basée aux USA, les nanoparticules utilisées dans ce cas précis ne contiennent pas d’éléments toxiques et bio-cumulatifs. Enfin, j’ajouterai avec humour, que vous n’êtes pas censer manger les pierres qui peuvent vous être soumises. La question des risques n’est donc pas réellement de mise comparé aux problèmes soulevés par celles de la présence du dioxide de titane dans l’alimentation.

The question arises because many questions about nanoparticles have not yet been solved. As with any new technology, some caution is needed. However, we can say several things: the synthetic DNA used is identical to the one contained in plants, vegetables … etc. It is therefore ingested daily by man. If a question must be asked, it concerns the whole nanoparticle. Based on the pre-requisites defined by the  European Commission and US-based Occupational Safety and Health Administration (OSHA), the nanoparticles used in this specific case do not contain toxic and bioaccumulative elements. Finally, I will add with humor, that you are not supposed to eat the stones that can be submitted to you. The question of risks is therefore not really relevant compared to the problems raised by those containing titanium dioxide in the diet.

  • Comment peut-on accéder aux informations contenues dans la pierre hôte ? How can we read the informations keep by the DNA ?

Pour cela, il est nécessaire de soumettre la pierre au laboratoire Gübelin. En effet, il est pour le moment le seul à détenir la technologie pour l’analyse et le décodage de l’ADN contenu dans les nanoparticules. Cependant, cela devrait dans les mois à venir être possible avec des laboratoires partenaires. Techniquement, comment cela fonctionne ? Les particules sont récupérées sur les parois des fissures à l’aide d’une solution tampon breveté par le laboratoire, puis soumise à une PCR Quantitative. Cette dernière analyse est une méthode particulière de réaction en chaîne par polymérase permettant de mesurer la quantité initiale d’ADN puis de le décrypter, libérant ainsi les informations codées. À ce titre, le Gübelin est le gardien des informations et le seul à y avoir accès. Il faudra donc faire appel à cette structure pour faire parler une pierre qui aura été soumise à ce procédé.

For this, it is necessary to subject the stone to the Gübelin laboratory. Indeed, it is for the moment the only one to hold the technology for the analysis and the decoding of the DNA contained in the nanoparticles. However, this should in the coming months be possible with partner laboratories, at least for extraction. But nothing is yet on. Technically, how does it work? The particles are recovered on the walls of the cracks using a buffer solution patented by the laboratory and then subjected to a Quantitative PCR. The last analysis is a particular method of chain reaction by polymerase for measuring the initial amount of DNA and then decrypting it, thereby releasing the encoded information. As such, the Gübelin is the custodian of information and the only one to have access to it. It will therefore be necessary to appeal to this structure to make speak a stone that has been subjected to this process.

  • Peut-on modifier les informations contenues dans la pierre ? Is it possible to modify the informations ?

Selon le laboratoire, les informations contenues dans la pierre sont inviolables. Par contre, une fois que la pierre a été soumise à une lecture de ses informations, il est nécessaire de remarquer à nouveau la pierre. C’est bien entendu le laboratoire qui se charge de cette étape.

According to the laboratory, informations contained in the stone are inviolable. On the other hand, once the stone has been subjected to a reading of its tagging, it is necessary to tag again the stone. It is of course the laboratory that takes care of this step.

Sur cette bague, la première émeraude soumise au procédé. On this ring, the first emerald tagged with this new process. Photo : Gübelin

  • Une première émeraude soumise au procédé. A first emerald tagged with the process.

Cette nouvelle technologie a été utilisée pour la première fois avec l’émeraude qui sertie la bague en platine Ancient Path de Gübelin Jewellery. Grâce à cet «Emerald Paternity Test», l’origine de cette émeraude d’un poids supérieur à 6 carats peut être clairement retracée jusqu’à la mine de Belmont à Itabira, Minas Gerais, au Brésil. Depuis lors, cette pierre précieuse peut être clairement rattachée à ses origines. Nul doute qu’il faudra suivre cette technologie et son évolution que je pense rapide. Le laboratoire ayant annoncé qu’il travaillait déjà à un marquage des rubis.

This new technology was used for the first time with the emerald which sets the platinum ring Ancient Path made by Gübelin Jewelery. Thanks to this « Emerald Paternity Test », the origin of this emerald weighing more than 6 carats can be clearly traced back to the Belmont mine in Itabira, Minas Gerais, Brazil. Since then, this precious stone can be clearly attached to its origins. There is no doubt that it will follow this technology and its evolution that I think fast. The laboratory announced that he was already working on ruby ​​marking.

Je suis toujours curieuse et enthousiasmée quand je vois les avancées technologiques que réalisent les laboratoires de gemmologie. Celle-ci est , à mon sens, indissociable aujourd’hui d’une volonté toujours plus affirmé de tracer les matières premières qui entrent dans le composition des bijoux. On le voit pour l’or, l’argent, le cuivre, les pierres gemmes ne peuvent donc pas échapper à ce mouvement. Ce marquage permettra aussi, peut-être, de faire évoluer les pratiques d’extraction. Les rendant plus vertueuses. C’est certainement un rêve en 2017 mais j’espère que nous y parviendrons un jour. Quoi qu’il en soit, je vais suivre avec intérêt ce nouveau procédé, ses évolutions et ses applications futures. Et je ne manquerai pas de vous en parler. Le future est déjà là !

I am always curious and enthusiastic when I see the technological advances that does the gemmology laboratories. This, in my opinion, is inseparable today from an ever more determined will to trace the materials that go into the composition of jewelry. We see it for gold, silver, copper, and gemstones, therefore, can not escape to this movement. This marking will also allow, perhaps, to evolve the extraction practices. Making them more virtuous. It is certainly a dream in 2017 but I hope we will achieve it someday. In any case, I will follow with interest this new process, its evolutions and its future applications. And I will not fail to tell you about it. The future is already here!

À bientôt !

See you soon !

Un commentaire Ajoutez le votre

  1. DEFFARGES dit :

    Article passionnant ! Merci de partager ces informations !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.