Curieux GRA

Juil 11, 2021

A une époque où le rapport de laboratoire de gemmologie n’a jamais été aussi important, il faut néanmoins ouvrir l’oeil pour ne pas se tromper et ne pas hériter d’un rapport faux ou contrefait. Explications.

Il y a quelque semaines, une de mes élèves est venue m’apporter une pierre en me demandant de vérifier la moissanite acquise sur le site Ali Express pour la modique somme de 10$, frais de port inclus. De prime abord, je me suis dit que c’était inutile de vérifier car, sans lire ce qui était écrit sur la couverture du rapport, celui-ci présentait toute la charte graphique d’un GIA. Mais en y regardant de plus prés, je me suis aperçue que j’étais devant un rapport signé GRA.

Ce type de document GRA est courant sur les sites chinois. A chaque fois, ce sont des moissanites synthétiques qui sont proposées. Photo: Aliexpress

Concernant la pierre de mon élève, pas de problème après vérifications, c’était bien une moissanite synthétique dont les caractéristiques correspondaient au rapport à l’exception du poids qui était très légèrement différent. Certes le prix m’a un peu étonné car il me semblait très bas mais je ne me suis pas attardé. J’ai quand même décidé de poster un mot sur le forum Gemmologie/Geminterest sur Facebook car c’était plus le problème de propriété intellectuelle qui me posait souci. J’ai échangé également avec des négociants qui, intrigués par le prix de ces pierres, ont décidé de commander quelques exemplaires. Les retours furent alors très mitigés car si plusieurs pierres s’avèreront être des moissanites synthétiques, d’autres ne le furent absolument pas. Pourtant, elles sont bien parvenues à destination avec un document GRA dont l’aspect se veut extrêmement qualitatif. Là encore, la ressemblance avec un rapport du GIA était frappante.

Pour mémoire, un rapport du GIA. Photo: GIA

Quelques semaines après, je me retrouve devant une pierre de presque 1 carat achetée comme un diamant. La pierre est présentée dans une boite, sans rapport, mais avec une étiquette notée GRA et un numéro à l’arrière de celle-ci. La pierre présente également une gravure laser typique des diamants certifiés. En écoutant les explications, je me rends compte de la méconnaissance du marché par cette personne et de la confusion bien réelle entre GRA et GIA. Je décide d’en savoir plus sur le GRA. Après quelques tests, le verdict est simple : il s’agit la-encore d’une moissanite synthétique.

Je finis par trouver plusieurs sites internets dont l’adresse DNS est reliée à la Chine mais dont l’adresse de contact semble basée à New York. En effet, en Chine, l’internet n’étant pas libre, il est nécessaire d’obtenir une autorisation du ministère des technologies pour ouvrir un site internet. L’un des sites donne aussi une adresse à Hong Kong. Dans notre cas, le GRA renvoie à ces différentes adresses :

Fait étonnant, entre mes premières recherches il y a moins de trois semaines et la rédaction de cette note, les sites ont été mis à jour. Une grande partie des fautes d’orthographes ont disparu et le site s’est enrichi de photos lui donnant ainsi un aspect plus sérieux. Je décide donc de rentrer le numéro de la pierre sur ces différentes occurrences. Et je finis par tomber sur un rapport correspondant approximativement à la pierre que j’ai entre les mains. Là-encore, comme précédemment, c’est le poids qui fait défaut. Le site indique 1 carats quand ma balance indique 0,94 carats. Qu’en conclure? Il semble que les pierres partent de Chine ou du moins qu’elles transitent par la Chine. Dans les deux cas que j’ai croisés, j’ai bien eu à faire à des moissanites synthétiques. L’apparence du rapport est trompeuse autant pour des professionnels peu avertis que pour des particuliers complétement néophytes du marché des gemmes. Quand au prix bas, je ne l’explique pas, sauf à ce qu’une usine – ou plusieurs – produise une telle quantité de ces pierres qu’elle arrive à obtenir des coûts de production au plus bas. Enfin, comment expliquer les « échanges » de pierres qui voit arriver d’autres matières que de la moissanite, peut-être simplement la multiplication des intermédiaires qui finit par provoquer la perte des informations de départ.

Méfiance donc sur ces pierres! Vous pouvez autant tomber sur des moissanites que sur d’autres choses. Le rapport qui va avec n’est clairement pas fiable et n’a qu’un objectif, imiter un GIA afin d’induire le client en erreur.

A bientôt !

À propos

marie chabrol

Bonjour, je m’appelle Marie. Conférencière, consultante & formatrice, j’écris avec passion sur l’univers de la joaillerie.

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