Anaïs Rheiner, lumineuse joaillerie

Avr 17, 2018

Dans le 6e arrondissement de Paris, juste derrière l’Église de Saint-Germain-des-Près se cache une boutique discrète qui mérite pourtant que vous la connaissiez. N’ayez pas peur, sonnez et poussez la porte pour entrer un monde où le bois, la pierre et le papier plissé vous accueillent. Dans cet écrin se cache la talentueuse joaillière Anaïs Rheiner et son remarquable travail floral. Or froissé, martelé, poli et pierres gemmes colorées vous y attendent. Tout un monde s’offre à vous, des bagues que l’on empile et collectionne au grès de ses envies, des boucles qui habillent délicatement l’oreille que dévoile la mèche indiscrète que l’on remet en place… Mais surtout, il y a Anaïs, son rire en cascade, sa passion des jardins et son accueil qui me donne, chaque fois, envie de rester des heures avec elle pour discuter joaillerie autour d’une tasse de thé.

Anais rheiner

Anais Rheiner. Photo : ©MarieChabrol

Anaïs, c’est aussi une histoire incroyable, faite de voyages et d’une sacré dose de volonté. Ne soyez pas timide, nous ferons juste un crochet par la Suisse avant de rejoindre les terres colorées et chaudes du Zimbabwe… Je vous emmène avec moi ?

Anais rheiner

Deux bagues en or jaune, diamants, tourmaline vertes, saphirs roses, saphirs oranges et améthyste. Photo : ©MarieChabrol

1981, Anaïs nait au bord du lac Léman à Lausanne. Quelques mois plus tard, elle quitte la Suisse pour l’Afrique. Son père, géologue, est recruté par l’industrie minière pour une mission de plusieurs années. Quand à sa maman, passionnée par les minéraux bruts, elle imagine et initie sa propre entreprise de création de bijoux. Mais il n’est ici nul question de joaillerie. Son domaine, c’est le collier, souvent imposant et coloré, composé principalement de gemmes d’origines africaines. Au début des années 90, la mission du père d’Anaïs se termine mais la famille ne souhaite plus quitter le Zimbabwe et plus particulièrement Harare où elle vit depuis plus de dix ans.

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Bague en or jaune et apatites. Photo : ©MarieChabrol

Dès son adolescence, Anaïs fréquente assidûment l’atelier boutique de sa maman. Elle y apprend les pierres, le mariage des couleurs, les perles qui plaisent. Elle y découvre aussi le métal, essentiellement l’argent, et ce que l’on peut en faire quand on sait le travailler et le maitriser. A 18 ans, son E-Level en poche, elle décide que la bijouterie sera son métier. Et elle entre dans l’atelier The Gold Center de Harare où elle restera deux ans. Cet apprentissage sur le terrain est profondément bénéfique et formateur.

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Des bagues que l’on collectionne. Trois bagues en or jaune, tourmaline rose pour la pierre la plus importante, saphirs roses et oranges. Photo : ©MarieChabrol

Mais la situation politique au Zimbabwe se dégrade et son économie avec. Elle décide donc de partir pour le Mozambique. Ce pays qu’elle connait déjà bien l’inspire depuis longtemps pour ses liens culturels avec le Portugal dont il fut l’une des colonies jusqu’en 1975. Elle s’installe à Beira où elle ouvre sa propre boutique. Elle y restera quelques années. A 24 ans, elle sent bien qu’il lui manque de la pratique comme de la théorie. Le fonctionnement à l’instinct à ses limites. Elle retourne à Harare et se renseigne sur les différentes formations liées à la joaillerie sur le continent africain. Finalement, elle se décide à partir pour l’Afrique du Sud et rejoint la ville de Durban et sa reconnue University of Technology. Elle y restera trois ans et obtiendra son Fine Art and Jewellery Design Degree. Entre temps, elle se formera aussi quelques mois à la Saint-Martins de Londres.

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Bague en or jaune, diamants, apatites et morganite. Photo : ©MarieChabrol

Son diplôme validé, se pose la question de savoir quoi en faire. S’installer à Durban est pour elle impossible. Mais pour comprendre cela, il faut comprendre la situation de l’Afrique du Sud. Bien que l’Apartheid ne soit qu’un lointain souvenir, celui-ci a laissé des traces durables dans les relations entre les communautés. La situation politique est complexe, les conflits raciaux entre les Zoulous, Boer et Hindous particulièrement vivaces. A cela s’ajoute la question de la sécurité pour les femmes. Après trois années à vivre dans ce climat, elle choisit de revenir dans sa ville presque natale de Harare. Quelques semaines plus tard, elle s’envole pour Paris où travaille sa sœur.

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Bague en or jaune, diamants et centre tourmaline rubellite de 4 carats. Photo : ©MarieChabrol

L’arrivée dans la  capitale française ne se fait sans encombres pour celle qui n’a connu que l’Afrique, ses cultures et surtout des pays où le système administratif n’a strictement rien à voir avec la France. En quête d’un lieu pour travailler, elle investit une ancienne cave à vins et y installe une petite boutique pour y vendre les colliers et les bijoux que confectionne l’atelier de sa maman. Nous sommes en 2007. Elle commence aussi très progressivement à produire ses propres bijoux. Courant 2010, elle rejoint les Ateliers d’Art de France et tente à plusieurs reprises le salon Maison & Objet. Je la rencontre très brièvement en 2014 alors que je viens de revenir à Paris, elle participe alors à la Biennale Révélations avec ses premières collections or et diamants. C’est à cette époque que tout s’enchaine assez vite. La Fondation Banque Populaire la remarque et lui accorde une bourse. Elle mettra cette somme à profit pour rénover et repenser entièrement la boutique de la rue Cardinale. Ainsi née l’identité d’Anaïs Rheiner et son installation officielle comme créatrice en joaillerie.

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Trois bagues en or jaune et morganites. Photo : ©MarieChabrol

Comme Anaïs aime apprendre, elle démarre des cours de ciselure avec Wiga Mikulski. Cela fait désormais trois ans qu’elle perfectionne sa technique. 2017 est aussi l’année des pierres. Jusque là il n’était question que de diamants et de toutes petites pierres de couleurs. Sa rencontre avec un négociant brésilien change la donne et elle se lance, intégrant tourmalines, morganites, apatites, tanzanites et même grandidierites à ses pièces.

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Bague en or jaune, diamants, saphirs jaunes et roses et tourmalines de type Paraïba. Photo : ©MarieChabrol

Sa joaillerie est légère, pleine de détails, aussi joyeuse qu’Anaïs. Colorée, proche de la peau, ses bijoux se collectionnent, se mélangent, habillent les mains de reflets lumineux. Voila une adresse que vous devez visiter. Et si vous n’êtes pas à Paris, la maison vient d’ouvrir un e-shop qui vous permettra d’admirer les pièces et, je le souhaite, de contacter cette jeune joaillière bourrée de talent !

À bientôt !

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Anais Rheiner

6 rue Cardinale, 75006 Paris

Téléphone : +33 (0)1 40 46 02 39
contact@anaisrheiner.com

À propos

marie chabrol

Bonjour, je m’appelle Marie. Conférencière, consultante & formatrice, j’écris avec passion sur l’univers de la joaillerie.

ma Bibliothèque idéale

Voici ma bibliothèque idéale. Tous ces livres font partis de ma propre bibliothèque et je les relis toujours avec un immense plaisir.