Serge Muller, investisseur créatif et heureux

Jan 4, 2019

A l’été 2015 ouvrait à Paris le concept-store Mad Lords. Ce lieu, singulier et radicalement différent de toutes les boutiques de joaillerie, a été fondé par Serge et Caroline Muller. Depuis maintenant presque quatre ans, cette boutique distille avec talent son style éclectique et une sélection réussie de designers internationaux. Régulièrement, s’y organisent des événements festifs allant de la présentation de créateurs à l’image de Beth Bugdaycay (Foundrea) ou Salama Khalfan Fine Jewellery à des soirées réunissant la crème de la scène indé parisienne comme Joe Starr ou plus récemment Melvil et Yarol Poupaud. Rencontre avec son fondateur Serge Muller dont le parcours étonnant explique les partis pris de cette enthousiasmante House of Jewelry.

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Dans la boutique Mad Lords de la rue Saint-Honoré. Photo : Mad Lords

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Serge et Caroline Muller. Photo : Stéphane de Bourgies pour Mad Lords

Avant d’être un dénicheur de talents joaillier, Serge Muller est d’abord un financier talentueux diplômé en droit et finance de l’Université de Dauphine mais se décrit comme « un véritable faire-valoir créatif« . Originaire d’une famille d’artistes avec des racines hongroises, Serge a grandi avec un père photographe d’art proche de Willy Ronis mais également inspiré par son oncle peintre Lazar Berson qui fonda la Ben Uri Gallery aujourd’hui intégrée dans le London Jewish Museum of Art. Adolescent, il se voit dans « le droit, le théâtre ou la finance« . « Bon en mathématique et bosseur« , il s’intéresse à cette dernière pour ce qu’elle peut apporter dans la concrétisation des projets. Après son magistère, son premier poste sera dans un cabinet de conseils, puis l’aventure de la banque d’investissements Exane dont il sera co-fondateur et associé avant de revendre la totalité de ses parts lors de la fusion avec BNP Paribas. Et de conclure sur ce chapitre de sa vie « J’ai aimé la finance pour sa capacité à créer. (…) Je m’y suis énormément amusé et épanoui. 30 ans de vie, ce n’est pas rien« . Vient alors l’idée de la création de ce lieu étonnant qu’est Mad Lords….

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Durant le Guitare Players Show du 22 novembre 2018 en présence de Yarol Poupaud et Manu Lanvin. Photo : Mad Lords

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Les bijoux de Beth Bugdaycay pour sa maison Foundrae sont présents chez Mad Lords. Photo : Mad Lords

A l’aube de son changement de vie, Serge Muller imagine la création d’un lieu qui rassemblerait les gens. Il explique alors à son épouse et partenaire – Caroline – « que les sociétés ne sont plus organisées comme avant en suivant le modèle historique des classes sociales. Mais que ce sont plutôt des « tribus » qui constituent la société actuelle. Historiquement, les tribus se reconnaissent au travers d’éléments divers et variés dont les bijoux et les tatouages« . Partant de cette vision assez réaliste des sociétés actuelles qui adoptent des fonctionnement plus transversaux, Serge et Caroline vont imaginer un lieu qui casse les codes du bijou. Et ainsi revenir à l’une de leurs passions communes : la joaillerie. Pour Caroline Muller, c’est aussi une continuité professionnelle après de nombreuses années aux USA et dans les services marketing de grandes maisons de luxe comme Ralp Lauren.

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L’espace Jacquie Aiche chez Mad Lords. Photo : Mad Lords

Le lieu justement trouve sa place dans les anciens locaux d’une entreprise d’encadrement photographique qui vit défiler les plus grands comme Cartier-Bresson ou un certain Willy Ronis… Ici, c’est « l’amour du beau » qui guide Serge et Caroline dans leurs acquisitions et propositions. « L’or, le platine, les pierres, le bois, le cuir » trouvent ici un écrin parfait. Auquel il a fallu naturellement trouver un nom… C’est ainsi que né Mad Lords, dont le nom est une synthèse de plusieurs sources d’inspiration. Tout d’abord, il y a un rapport avec le poète anglais Lord Byron que l’on peut définir comme une « égérie du dandysme et dont le père était surnommé John « Mad » Byron« . Il faut aussi regarder la traduction française du nom de la boutique « Mad Lords peut se traduire comme bourgeois exubérants, dans le sens le plus positif que l’on peut donner à cet adjectif. Et c’est exactement ce que sont nos clients. Ils peuvent s’acheter de beaux bijoux, de belles signatures, mais nos pièces ont une identité à part. Nous sommes géographiquement tout à coté de la Place Vendôme et pourtant si loin« . Enfin, il y a les initiales M.L. dont le L. est « la première lettre des premiers prénoms » de Serge et Caroline : Lionel et Léonore. Et Serge Muller d’ajouter « Il y a trois mots qui définissent le lieu : la croyance car ce projet et les gens qui le portent sont atypiques et – donc – il faut y croire ; la passion car Caroline et moi nous passons notre vie dans ce projet et nous voulons communiquer cette passion que nous avons pour la joaillerie ; enfin l’incarnation, car je pense sincèrement qu’un projet entrepreneurial n’a aucune chance s’il n’est pas incarné et c’est d’ailleurs pour cette raison que nous ne souhaitons pas nous développer ailleurs que rue Saint-Honoré« .

Les bijoux de la marque bohème et tribale Jacquie Aiche. Photo : Mad Lords

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Collier avec médailles en or émaillé et diamants par Jacquie Aiche. Photo : Mad Lords

Et justement choisir la rue Saint-Honoré n’est pas anodin. Il fallait une « adresse qui incarne le lieu et je voudrais que ce lieu devienne mythique dans le monde. C’est un projet très ambitieux. Bien sur, avec Caroline nous incarnons ce projet mais nous avons également une super équipe avec des gens qui nous complètent et nous ressemblent« . Aussi quand vous viendrez la première fois chez Mad Lords, vous vous apercevrez que le lieu n’est pas visible de la rue. Ce qui était une volonté forte de Serge qui « souhaitait absolument un endroit caché pour avoir le temps de recevoir les clients dans des conditions optimales, un peu comme si je recevait des gens chez nous« . L’aventure va donc commencer avec un petit appartement dans ce même secteur pour, ensuite, devenir le lieu que nous connaissons actuellement : « la rue Saint-Honoré correspondait parfaitement à l’état d’esprit que nous voulions créer. Nous voulions un quartier, certes parisien, mais également tourné vers l’international » ajoute Serge. La découverte de cette ancienne usine est le fruit du hasard : « mes bureaux du 2e étage donnaient sur la verrière dans laquelle nous sommes actuellement. J’ai donc retrouvé le propriétaire qui était la Fondation d’Auteuil à laquelle une vieille dame de l’immeuble avait légué ses biens et les choses se sont enchainées« .

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Comme une mise en bouche, Mad Lords offre un tout petit espace visible depuis la Rue Saint-Honoré. Ici, il est possible de se faire percer les oreilles et d’admirer un petit panel de la collection Mad Lords. Comme une parfaite invitation à pousser la porte cochère du N°316… Photo : Mad Lords

L’aspect philanthropique qui entoure la découverte du lieu a d’ailleurs « profondément touché » Serge Muller. Lui-même nous expliquant qu’il est « un membre actif au sein de son ancienne université » depuis la loi LRU de Valérie Pecresse qui a autorisé les universités a avoir leurs propres fondations. Il est ainsi l’un des trois plus importants mécènes et fait parti du conseil d’administration nous rappelant ainsi « l’importance de cette université » dans son parcours : « je me sens redevable envers ce lieu ou j’y ai reçu une éducation et une formation de grande qualité qui ont forgé l’entrepreneur que je suis« . A la question de savoir si ce lieu est une sorte d’incubateur pour créateurs, Serge reconnait « que Mad Lords doit aussi servir à aider des créateurs qui passent souvent plus de temps à créer qu’à communiquer« . Ici, ils trouvent un lieu où leurs bijoux s’expriment pleinement. On trouve donc des marques connues à l’image de Maor Cohen ou de Jacquie Aiche mais également des maisons plus discrètes comme Verger Frères ou de Sophie d’Agon dont les jolies créations s’offrent à vous dans ce bel écrin !

A bientôt !

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Mad Lords vous accueille au 316 rue Saint-Honoré et également au Bon Marché, du lundi au samedi de 11 à 19 heures. Bonne visite et découverte !

À propos

marie chabrol

Bonjour, je m’appelle Marie. Conférencière, consultante & formatrice, j’écris avec passion sur l’univers de la joaillerie.

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Voici ma bibliothèque idéale. Tous ces livres font partis de ma propre bibliothèque et je les relis toujours avec un immense plaisir.